Il existe des conflits dans toute organisation; dans une certaine mesure, les conflits sont signe d'un sain échange de vues et de créativité. Les conflits peuvent cependant être nuisibles et entraîner le mécontentement des employés, une baisse de la productivité, un piètre service à la clientèle, l'absentéisme et un plus haut taux de roulement du personnel, un stress plus important lié au travail ou, ce qui est pire, des litiges fondés sur des plaintes pour harcèlement ou un milieu de travail hostile.
Dans cette section, nous étudions la gestion des conflits quotidiens qui se produisent dans tout milieu de travail — comment les percevoir et les comprendre, et comment les gérer efficacement. En tant que DG ou gestionnaire, c'est souvent votre rôle de discerner si un conflit est une composante normale d'une journée de travail et des relations de travail, ou s'il s'agit d'un problème plus sérieux nécessitant de recourir à des services externes ou d'appliquer une politique et une procédure plus formelles de résolution de conflits.
Norme de gestion RH correspondante : Norme 4.5
L'organisation dispose d'une politique sur la résolution de conflits.
Les conflits font inévitablement partie des relations humaines. Lorsque l'engagement envers la mission et les longues heures de travail vont de pair avec de maigres ressources, les milieux de travail peuvent donner lieu à des conflits interpersonnels. Les conflits peuvent surgir lorsque les points de vue divergent et que les préoccupations semblent incompatibles. Si nous pouvons accepter les conflits comme un élément naturel de notre paysage émotionnel (au lieu d'attendre ou d'espérer qu'ils disparaissent et ne surgissent plus), nous pourrons les résoudre plus facilement.
Les gestionnaires doivent pouvoir discerner et comprendre les différents niveaux de conflit et les façons dont se manifestent les conflits à chaque niveau. Un des premiers signes qu'il existe un conflit est un sentiment tenace ou une tension qui vous indique que quelque chose se prépare. Prêtez attention au langage non verbal : bras croisés, yeux baissés, le fait de s'asseoir dos à vous ou loin de vous ou du groupe. Ces signes peuvent vous donner des indications importantes de la situation qui prévaut et ils peuvent vous aider à cerner les prochaines étapes à suivre. Si l'on ne réagit pas à ces signes en temps opportun, la situation peut dégénérer en un niveau plus élevé de conflit et l'opposition peut se manifester plus directement, avec conviction. On aborde de façon plus approfondie, dans les sections ci-dessous, cet aspect des conflits.
Les premiers signes d'avertissement font le plus souvent partie d'une dynamique plus complexe qui s'est installée au sein de votre organisation. Dans le cadre de notre analyse, il est utile de comprendre la source des conflits potentiels; voici des sources fréquentes de conflit :
Le conflit de valeurs surgit lorsqu'il y a incompatibilité dans les préférences, les principes et les pratiques auxquelles croient les personnes, par exemple la religion, l'éthique ou la politique.
Le conflit de pouvoir se produit lorsque chaque partie désire maintenir ou maximiser l'influence qu'elle exerce au sein d'une relation ou d'un environnement social, par exemple dans un processus de prise de décision.
Le conflit économique surgit lorsqu'on dont rivaliser pour obtenir de maigres ressources, par exemple des ressources financières ou des ressources humaines.
Le conflit interpersonnel se produit lorsque deux personnes (ou plus), dans le cadre de leur relation, ont des besoins, des buts ou des approches incompatibles, par exemple différents styles de communication ou de travail.
Le conflit organisationnel dépend des inégalités en raison de l'organigramme et des relations entre supérieurs et subordonnés.
Le conflit découlant du contexte est un conflit causé par des facteurs extérieurs à l'organisation, par exemple une récession, un changement de gouvernement ou un haut taux d'emploi.
Si vous pouvez identifier la source d'un conflit, il vous sera plus facile de le résoudre. Il est important de souligner qu'une variété de facteurs ont une incidence sur le moment et la manière dont les conflits surviennent. Afin de bien comprendre la situation, étudiez toutes les sources de conflit mentionnées ci-dessus avant de prendre une action. Voyons maintenant les différentes façons d'aborder et de gérer les conflits.
Thomas et Kilmann (1972) ont élaboré un modèle exposant cinq stratégies ou styles de gestion des conflits que l'on retrouve fréquemment. Ils affirment que les gens ont généralement une façon personnelle et habituelle de gérer un conflit, qui se manifeste lorsqu'ils sont soumis à la pression. Bien qu'il soit possible que cette manière soit le style le plus efficace pour résoudre un conflit, très souvent ce n'est pas le cas et cela ne sert qu'à envenimer la situation. Une première étape pour gérer les conflits est de découvrir vos styles préférés de gestion des conflits, ce qui vous permet ensuite d'apprendre comment gérer une variété de situations en utilisant différentes approches.
Ces styles relèvent de deux attitudes de base :
L'assertivité, attitude selon laquelle les comportements d'une personne visent à satisfaire ses propres intérêts. Cette dimension est également liée à l'atteinte des objectifs personnels.
La serviabilité, attitude selon laquelle les comportements d'une personne visent à satisfaire les intérêts d'une autre personne. Cette dimension suppose un souci pour la relation.
Chaque style est approprié dans des contextes particuliers et l'idéal est d'apprendre comment agir de façon stratégique lorsqu'on aborde un conflit.
L'accommodement est un style où l'on ne s'affirme pas et où l'on collabore. L'objectif ici est de céder. En général, une personne utilisant ce style de conflit néglige ses propres besoins pour satisfaire les intérêts d'une autre personne. Cette attitude en est une d'abnégation et vise à préserver la relation plutôt qu'à réaliser un objectif. Ce style est aussi qualifié d'apaisement - on désire éviter les heurts - et c'est le contraire de la compétition.
Exemple :
Devise : « J'accepte tout ce que tu veux. »
Pour : Cette attitude peut aider à maintenir des relations harmonieuses, on peut admettre qu'il existe une meilleure façon de faire les choses.
Contre : Le fait de ne pouvoir satisfaire ses propres besoins peut engendrer du ressentiment et diminuer votre influence - attitude du martyr.
Le style compétitif est orienté vers le pouvoir: la personne s'affirme beaucoup et collabore peu. L'objectif ici est de gagner - la personne suit son programme sans s'occuper de l'autre. Il peut s'agir de défendre ses propres besoins ou une situation enviable, ou simplement d'essayer de gagner. On accorde beaucoup d'importance à l'objectif. Ce style est aussi appelé « force » ou style dominant.
Exemple :
Devise : « C'est ça ou rien. »
Pour : Attitude où l'on décide et s'affirme, satisfaisant ses propres besoins.
Contre : Ce style peut nuire aux relations, abaisser les autres.
L'évitement est un style par lequel on ne s'affirme pas et on ne collabore pas. L'objectif ici est de retarder les choses. La personne n'essaie pas immédiatement de satisfaire ses intérêts ou ceux d'autrui; elle est indifférente à la façon dont le problème sera solutionné et à la relation interpersonnelle, et elle se retire ou remet à plus tard le règlement du conflit. Cette attitude peut favoriser un répit nécessaire face à une situation ou au contraire envenimer les choses si le problème continue à être ignoré. Cette attitude est aussi qualifiée de fuite.
Exemple :
Devise : « J'y penserai plus tard. »
Pour : Ne pas tout prendre au sérieux, les délais peuvent être utiles.
Contre : La pression s'accumule et l'éclatement se produit; on ne règle pas les enjeux importants; le fait d'éviter le problème pour ensuite le régler peut parfois demander plus d'énergie.
La collaboration est un style où l'on s'affirme tout en collaborant. L'objectif est de trouver une solution qui convienne à tous. En général, en adoptant cette attitude, on cherche à trouver des solutions créatives aux problèmes afin de satisfaire les intérêts des deux personnes impliquées; on apprend, on écoute et on agit en tenant compte des intérêts de l'organisation et des intérêts des personnes. Cela demande du temps et des efforts. Cette attitude est aussi qualifiée de méthode de résolution de problèmes ou style intégrateur, et c'est le contraire de l'évitement.
Exemple :
Devise : « Deux têtes valent mieux qu'une. »
Pour : Trouver la meilleure solution pour tous, ce qui engendre un haut degré d'engagement et une plus grande créativité pour la résolution des problèmes, et contribue à édifier une équipe.
Contre : Ce style demande du temps et de l'énergie; il peut être épuisant et inutile de l'appliquer à tous les conflits.
Le compromis est une attitude à mi-chemin entre l'affirmation de soi et la collaboration. L'objectif est de vite trouver un terrain d'entente. Les parties trouvent une solution rapide et mutuellement acceptable, chaque personne faisant des concessions. Cette attitude est aussi appelée « partage ».
Exemple :
Devise : « Concluons une entente. »
Pour : On trouve rapidement une solution qui satisfait les besoins des deux parties; on règle temporairement des problèmes complexes; c'est une alternative lorsque les stratégies de compétition et de collaboration ont échoué.
Contre : Ce style peut engendrer des problèmes et empêcher de trouver des solutions à plus long terme; les compromis acceptés peuvent se révéler non satisfaisants et devoir être revus.
Au sujet de la résolution de conflits, cf. le site Web de Ralf Kilmann (en anglais seulement) http://www.kilmann.com/conflict.html
Bien que chaque personne puisse utiliser, selon les différentes situations, les cinq styles de conflit, on a tendance à adopter habituellement une ou deux attitudes en cas de conflit. Par exemple, devant un conflit, une personne peut inconsciemment recourir à un compromis même si la situation évoluerait plus rapidement et plus efficacement avec un accommodement. Afin de régler efficacement une situation de conflit, il faudra apprendre à utiliser les différentes stratégies de gestion de conflit.
Pour utiliser de façon stratégique les styles de conflit, on peut se servir de la grille suivante. Évaluez d'abord la situation : Qu'est-ce qui est pour vous le plus important? L'équipe? L'organisation? Est-ce l'objectif ou la relation en jeu? Lorsque la relation prime, utilisez les stratégies qui se trouvent du côté droit de la grille (collaboration ou accommodement). S'il est crucial de maintenir avant tout l'objectif, vous pourriez utiliser les deux stratégies qui se trouvent au haut de la grille (compétition ou collaboration). Lorsque l'objectif et la relation sont également importants, un compromis serait probablement la solution la plus efficace. Lorsque l'objectif et la relation importent peu, il se peut qu'il convienne plutôt d'éviter le conflit.
Aide-mémoire :
Objectif crucial (le plus important) et relation négligeable = compétition
Objectif négligeable et relation cruciale = accommodement
Objectif ET relation cruciaux = collaboration
Objectif ET relation négligeables = évitement
Objectif et relation importants, mais aucun plus que l'autre = compromis
Voici un exemple pour les services de garde :
La DG et la directrice de la garderie essaient de finaliser les détails d'une lettre. Le résultat ou l'objectif, qui est de rédiger une excellente lettre qui transmettra adéquatement leur message, est d'une grande importance pour ces deux personnes et, en fait, pour toute l'organisation. Une relation dynamique et harmonieuse entre la DG et la directrice assurera une relation de travail durable. Toutes les deux sont réputées pour leur expertise personnelle dans leur domaine respectif et elles doivent cosigner cette lettre. Alors que les tensions augmentent, la collaboration (résolution créative du problème) serait l'attitude la plus bénéfique pourvu que les deux parties acceptent de prendre le temps de trouver une solution mutuellement satisfaisante. En faisant preuve de bonne volonté et en utilisant leur habilité, elles peuvent trouver une solution bien meilleure que celle que chacune d'elles avait d'abord suggérée. En ce cas-ci, tant la relation de travail que l'objectif sont d'une importance cruciale.
Lorsque vous travaillez avec un groupe, il est inévitable que vous ayez à travailler avec une personne au caractère difficile. Souvent, cette personne n'est pas consciente de l'effet qu'elle produit sur le groupe ou des conséquences de ses actions sur les autres personnes. Selon les différents points de vue, toute personne peut être considérée à un moment ou l'autre comme une personne au caractère difficile. Dans son milieu de travail, chaque personne peut être productive tout en étant la source de problèmes. Tout dépend de la façon dont on examine la situation. Avec un simple changement de perspective, une situation que vous subissez avec une personne au caractère difficile peut se transformer en une expérience d'apprentissage enrichissante pour vous.
Si vous éprouvez des sentiments très négatifs envers une autre personne, il vous faut considérer deux éléments: vous-même et l'autre personne. Commencez par vous examiner : il est essentiel de comprendre la cause de vos sentiments pour cette personne et de cerner les stratégies qui pourraient améliorer la situation. Par exemple, votre style préféré de gestion des conflits pourrait aggraver une situation en raison d'une méthode particulière de communication. Si vous avez tendance à éviter les conflits, les courriels sont-ils la seule façon que vous ayez de régler les conflits au bureau? Ou dites-vous dans un courriel des choses que vous ne diriez jamais en personne? Pour beaucoup d'entre nous, il est facile de se cacher derrière notre ordinateur et de prendre un ton plus audacieux ou agressif. Il s'agit essentiellement de changer votre comportement pour travailler efficacement avec cette personne. Il existe bien des façons de communiquer avec vos collègues: rencontres individuelles, appels téléphoniques, courriels, vidéoconférences, etc. Les possibilités sont illimitées.
Lorsque vous travaillez avec une personne au caractère difficile, commencez par localiser le problème à l'intérieur de vous. Dans son livre Learning in Relationship, le Dr Ronald Short affirme : « L'effet qu'une personne a sur nous (les sentiments et les pensées que nous avons en nous-mêmes) relève de notre responsabilité. Pour comprendre cet effet, nous devons nous regarder nous-mêmes, et non juger les autres » (1998). Rappelez-vous de prendre pour règle de ne pas vous sentir personnellement visé (ce qui est plus facile à dire qu'à faire!). Vous n'êtes pas responsable de la façon dont les gens agissent : les gens parlent et agissent selon ce qu'ils vivent.
Si vous comprenez pourquoi telle personne vous dérange, ainsi que les raisons qui pourraient la pousser à agir ainsi, vous serez en mesure d'engager une conversation.
Important : Rappelez-vous que vous pouvez uniquement contrôler la façon dont vous gérez un conflit, non le résultat. Il arrive que des personnes aient tout simplement un caractère difficile et rien de ce que vous pourrez faire ne changera cette réalité. Le plus souvent, le comportement d'une autre personne dépend de facteurs sur lesquels nous n'avons aucune influence, mais bien qu'il soit important de comprendre ce fait, cela n'atténue pas l'influence négative ni les fortes émotions qui peuvent être suscitées (tant chez vous que chez d'autres personnes de votre organisation) par une personne au caractère difficile. Il peut être inévitable de devoir composer avec des personnes au caractère difficile, mais l'intimidation n'est jamais acceptable.
Si vous décidez d'aborder la personne impliquée, souvenez-vous qu'une communication efficace est la condition pour réussir à régler un conflit, et qu'une bonne communication dépend de deux facteurs : (1) reconnaître les personnes, les écouter et utiliser de façon productive leurs différences; et (2) développer une approche personnelle pour traiter avec les gens de façon efficace.
Lorsque ce genre de discussion est mené avec succès, le résultat est bien supérieur à ce que vous auriez obtenu simplement en changeant votre langage ou votre façon d'aborder la situation. Faites preuve d'ouverture et de curiosité, il y a beaucoup à apprendre les uns des autres. Les stratégies de gestion des conflits sont un côté de la médaille; la façon dont vous gérez la communication pour régler le conflit est l'autre face de cette médaille. Consultez la section sur les communications interpersonnelles pour des conseils sur la façon de communiquer efficacement.
Liens et ressources
Recognizing Workplace Aggression in the Non-Profit Sector : Taking Action
Le Réseau atlantique pour la promotion de la santé communautaire (RAPSC) a préparé cet important manuel pour les organisations communautaires, afin de contrer l’agression en milieu de travail (en anglais seulement).Managing Workplace Conflict (http://www.mala.ca/conflict/index.asp)
Un site élaboré par l’Université de l’île de Vancouver (Colombie-Britannique) afin d'aider ses employés à gérer les conflits en milieu de travail; on y trouve une perspective unique sur la façon d'aborder un employé, de gérer la colère et de réagir à la critique (en anglais seulement).
Lectures suggérées
The Director's Toolbox, par Paula Jorde Bloom et Kay Albrect (en anglais seulement) – une série de cinq livres publiés par New Horizons.
A Great Place to Work, par Paula Jorde Bloom (en anglais seulement) – publié par la National Association for the Education of Young Children (NAEYC).
Working Through Conflict : Strategies for Relationships, Groups, and Organizations (5e éd.), par Joseph P. Folger (2004) (en anglais seulement) – une introduction à la gestion de conflits, ancrée dans la théorie et la recherche actuelles.
Learning in Relationship : Foundation for Personal & Professional Success, par Dr. Ronald Short (1998) (en anglais seulement) – une série de brèves réflexions qui aident le lecteur à découvrir en lui-même la source du problème de communication.
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